Cicada the Burrower - Blight Witch Regalia

Cicada the Burrower - Blight Witch Regalia

Chroniques 9 Novembre 2023

Après Corpseflower qui a été acclamé par la critique (composée de moi-même et d’autres amateurs de Black expérimental), le one-woman band américain revient avec Blight Witch Regalia, une nouvelle oeuvre à cheval entre le romantisme mélancolique et la rigueur funéraire. La musique met en scène une dissonance intime dans les expériences personnelles, à cheval entre la poésie du monde et son tragique le plus criant.

Blight Witch Regalia s’ouvre sur un rythme lo-fi accompagné de trompettes, confirmant les influences rythmiques de Corpseflower. C’est donc d’autant plus surprenant qu’on trouve du chant Black Metal et de la dissonance au-dessus de cette instrumentation passée au phaser.

Herald of Lions continue avec une rythmique lo-fi mais avec cette fois-ci des samples plus marqués et une rythmique Jungle sur laquelle se posent les guitares saturées qui sont légèrement sous-mixées pour participer à l’ambiance tout en laissant la majorité de l’espace sonore à la batterie.

Comme son titre l’indique, Fairy Light est plus léger, avec une rythmique plus House et des carillons qui accompagnent des effets de vent et du piano. Le morceau est instrumental, comme son précédent, et sans dissonance, ce qui permet du repos dans le travail des atmosphères. 

Car il semble que Cicada the Burrower ait bien entrepris un travail d’atmosphères, en développant son côté chill et planant tout en conservant des éléments de Black Metal comme le chant et les guitares saturées pour créer des tensions et du contraste, comme c’est le cas dans Make Still This Beating Heart. Ledit morceau passe par un passage décontracté à un moment plus Trap, rappelant le mélange de Black et de Trap qui a pu émerger dans les scènes underground. On constate aussi dans ce morceau différents registres de chant, avec un Black Metal assez classique et un autre plus proche du chant saturé crié comme on pouvait en trouver discrètement dans l’album précédent.

A la suite, Aries, you ripped the child out of me est bien plus agressif puisque les riffs sont plus mis en avant et le rythme est nettement plus tranchant avec ses ouvertures de charley. C’est toutefois compensé ensuite par les nappes de guitare et la mélodie au synthé’ accompagnée de réverb’ qui permettent un passage atmosphérique massif mélodiquement mais pas agressif. Enfin, le morceau se clôt par un passage au piano travaillé pour être légèrement granuleux, typique du Lo-fi.

Il est assez paradoxal de lire le titre des morceaux et leurs ambiances pourtant doucereuses. La dissonance vient toujours comme la fin de l’innocence (ou son absence pure et simple), comme It was a mistake s’ouvre par un bruit sourd qui rappelle un coup de canon et nous projette ensuite dans les nuées avec une mélodie légère et une rythmique à laquelle on a appliqué de la réverb’ et de la distorsion pour lui donner un côté surréel. L’entrée des guitares et du chant guttural nous rappelle alors à la rudesse du monde, mais seulement par accoups, comme des flashbacks traumatiques, tandis que la mélodie au synthé’ continue de progresser en fond en mesure du temps qui s’écoule et du développement.

C’est toujours le cas d’Atrium et de son synthé’ très doux, proche de la Chillwave et ses effets crépitants. La rythmique est plus simple, plus linéaire et le tempo est moins rapide, ce qui fait de cet avant-dernier morceau un moment de détente, de relaxation en attendant la fin de l’album.

En chant du cygne, Crescent Moon Smile continue dans un mélange de Chillwave auquel se mêle des rythmiques plus saccadées et des éléments de Black Metal. On passe de moments extrêmement légers à d’autres bien plus denses et agressifs. Les trompettes sont de la partie dans cet ultime morceau, comme pour nous rappeler le morceau d’ouverture, comme le Black Metal nous ramène aux blessures vécues mais garde toujours en toile de fond une mélodie garante de notre rémission.

A cheval entre The Caretaker, Dodheimsgard et Forhill, Cicada the Burrower peint des cieux tantôt clairs, tantôt extrêmement lourds et orageux. Si Corpseflower était un appel évident à la mort, il semble que Blight Witch Regalia semble être bien plus une acceptation mélancolique de la vie. Il ne s’agirait pas d’une cigale en train de sortir de terre, au contraire, mais plutôt d’un insecte se remémorant sa larvation sous-terraine et tout ce qu’elle comportait à la fois de tendre mais aussi de traumatique.

A propos de Baptiste

Être ou ne pas être trve ? Baptiste vous en parlera, des jours et des jours. Jusqu'à ce que vous en mourriez d'ennui. C'est une mort lente... Lente et douloureuse... Mais c'est ce qu'aime Baptiste ! L'effet est fortement réduit face à une population de blackeux.