Review Cernunnos

Review Cernunnos

Live Reports 5 Mars 2020

Départ : Chaumont - 9h. Arrivée : Noisiel - 14h.

Une fois les quelques mètres qui séparent l'arrêt TER de la rue de la ferme, le bâtiment ne laisse aucun doute: c'est la ferme du Buisson, et le Cernunnos se joue entre ses murs. 


Après que nous avons fait le tour des lieux et posé nos affaires dans le modique espace presse, les concerts commencent, et mes reviews aussi. 


Dans la première salle, c'est Prima Nocta qui ouvre le bal. Les cornemuses et le luth donnent le ton à l'ambiance païenne et volontairement kitsch du groupe. La caisse claire a doublé ses peaux, s'octroyant ainsi un son sec qui donne lui donne une attaque décuplée et des percussions viennent agrémenter le morceau comme dans Slipknot - et comme Slipknot elles ne servent à rien sinon à l'ambiance. C'est justement ce qui a fait la réussite de Prima Nocta à mon sens, son ambiance. Car malgré de très bons musiciens tous polyinstrumentistes, le groupe tombait vite dans le cliché. Seulement, sa place en début de festival lui permettait de s'adresser à un public à galvaniser dans ce concentré d'ambiance celtique et non à lasser, et ce fut chose faite en ce qui me concerne. 


La petite salle a alors pris le relais pour le projet de Black Metal Atmosphérique féminin Vermilia. En dépit d'un bon usage des costumes qui masquaient les musiciens de scène pour ne laisser voir que le cœur du projet, la chanteuse et tenante du one-woman band, le groupe n'a pas su me convaincre pour autant. En effet, la musique m'a semblé manquer d'ampleur. Le chant lyrique est très bien mais se distingue faiblement par-dessus les instruments tandis que le chant black sursature totalement l'atmosphère et la brouille encore plus. Ce déséquilibre entre les mélodies et le chant et entre les différents chants eux-mêmes créé un décalage qui s'est manifesté par des sursauts plutôt que par des envolées, d'où ma déception. 


Retour dans la grande salle pour Black Messiah cette fois ci. Si le dernier album du groupe allemand m'avait plu grâce à son mélange de passages narrés et de Pagan Black, cet équilibre ne s'est pas retrouvé sur scène à mon grand regret. Le concert a plutôt fourni un Pagan Black assez classique c'est à dire carré, efficace, un peu soûlard par moments mais le genre veut ça. Les musiques ne se réduisent pas à ça pour autant car il y a eu de belles mélodies et quelques passages narratifs. Le groupe a donc pu poursuivre la lancée de Prima Nocta, avec quelques modifications comme le violon joué par le chanteur - ce qui est impressionnant au regard de la prise à la gorge de l'instrument - mais un ressenti similaire à la sortie. 


Pour Saor en revanche, le violon est joué par un musicien dédié, ce qui est très important puisque ça lui permet de se focaliser sur les légatos qui participent autant des envolées lyriques que du caractère mélancolique du groupe. Le grain Black Metal est apporté par le chant puissant d'Andy Marshall et la batterie en blastbeats, le groupe joue ainsi sur les deux tableaux de l'agression et de la délicatesse et la juste retransmission de cet équilibre aura permis un public dévoué. 


Saor a donc placé la barre haut et c'aurait été difficile pour un groupe de Metal de passer après. Ça tombe bien puisque c'est Rastaban qui a pris le relais et que c'en n'était pas. Rastaban a plutôt joué des musiques à cheval entre le païen et le rituel avec son violoncelle, son luth, son didgeridoo et surtout sa chanteuse qui joue un rôle de prêtresse. La petite salle a laissé le groupe développer son atmosphère intimiste sans problème et a totalement réussi en présentant (enfin!) du Pagan qui ne soit pas cliché. 


Le Black Metal à proprement parler a ensuite pointé le bout de son nez avec Anomalie. Bien sûr, les compositions tendent vers l'Atmospheric ou le Post-Black Metal (si tant est que ces termes aient un sens) avec les ajouts de passages Rock ou Shoegaze faits par Narrok, mais ces différents points sont abordés en profondeur dans l'interview qu'il nous a donnée. Pour le concert en lui-même, ce fut très bien, les différents passages se sont bien enchaînés sans qu'aucun ne dénote ou soit mal équilibré, d'autant que les totems présents sur scène conféraient une ambiance chamanique au groupe. 


Enfin, Unleashed a clôturé la soirée avec un Death Metal assez influencé par le Thrash, un groupe qui plaira aux amateurs de Morbid Angel et de Nile mais qui ne me parle pas forcément. 



Après un aller-retour dans le RER, un repas, un déjeuner et une interview, la deuxième journée s'annonçait plus paisible 


D'autant plus qu'elle a commencé en retard, puisque je n'ai pas pu assister aux premiers concerts. Ce second jour a donc été inauguré par Veliocasses et ses flûtes. Le groupe réalise un Black Métal avec des flûtes qui ont tantôt un rôle lyrique, tantôt une relégation dans les sons d'ambiance - un genre de sous-Saor dans les mélodies, ce qui explique le succès du groupe auprès du public. Je comprends donc tout à fait la pertinence du groupe et sa réussite au Cernunnos mais je n'ai pas été plus convaincu que ça, notamment à cause de quelques compositions qui m'ont paru trop "patchwork" et de quelques imperfections lors du concert qui brisent hélas l'expérience immersive. 


Mais le gros poisson de l'après-midi, c'était Toter Fisch: un groupe de Black Metal pirate. Avec un tel thème, j'étais évidemment sceptique et je craignais le pire: le beauf, la pire espèce de metalleux, celui qui a une casquette à canettes et qui lance un pogo contre Noémie, 8 ans, leucémique. 

Il a fallu une minute au groupe pour dissiper les craintes : au premier hurlement sorti, j'étais déjà conquis. Les musiciens ont été très bon et l'accordéon n'était pas pouet-pouet ou railleur, au contraire, il a même permis des mélodies mélancoliques. Le public a confirmé mon ressenti par sa mobilisation car la musique est dansante, proche de la gigue par moments, tout en étant bien conçue et burnée. Mais ce n'est pas tout, Toter Fisch prend même la peine d'ajouter des arrangements subtils dans ses morceaux comme du marimba ou des percussions, c'est dire! Ce fut donc une excellente découverte et un excellent concert, en plus d'être un groupe très sympathique. Peut-être est-ce grâce à son thème pirate mais Toter Fisch a brûlé les planches (ok j'arrête les blagues.) 


Après une petite pause, je suis allé voir Sojourner, un groupe de Black Metal atmosphérique. Le côté "atmosphère" est présent par les temps longs que le groupe laisse, ce qui le rend très accessible et explique son succès auprès du public. Seulement, le groupe manque d'identité scénique et sonne comme trop d'autres groupes: c'est comme une glace à l'eau, c'est pas mauvais mais on y revient pas pour autant. 


Bloody Tyrant, en revanche, a bien défendu son identité. Le groupe marie des chants black virtuoses avec de la pipa et de la flûte chinoise. Pour sa première tournée en Europe, le groupe taïwanais vient revendiquer un Black Métal et carré malgré des structures complexes et en profite pour défendre l'identité de son pays contre l'ingérence chinoise. En ressort une musique virulente et singulière qu'on se plaît à écouter et qu'on redemande. 


Enfin, le festival s'est fini avec Turisas. Le genre du groupe n'est pas mon favori mais il faut leur reconnaître une vraie présence de scène, avec des passages mélodiques me rappelant Wagner ou Dvorak, et surtout un très beau décor semblable à une icône du Christ et de la Jérusalem céleste. 


Voilà mon ressenti pour ce qui est des concerts. Pour ce qui est du festival en lui-même, le Cernunnos se dote de solides atouts avec une cadre agréable qui nous isole de la ville et nous fait oublier qu'on est en région parisienne. D'autant que la présence de poules, d'animation et de stands médiévaux unit les festivaliers dans une ambiance médiévale commune au lieu de rompre l'ambiance des concerts et celle de la ferme. Les stands étaient par ailleurs intéressants, avec des artisans comme des cuisiniers - même si l'absence de repas végétariens est un réel problème dans un festival de cette taille. L'autre problème est l'espace presse qui est exigu et surtout très bruyant, ce qui est très embêtant pour les interviews et qui se ressent dans l'interview de Bloody Tyrant que j'y ai faite. Mais l'organisation du festival a su résoudre ces problèmes et nous a très bien reçu, ce qui me motive à y retourner et je vous invite d'en faire de même si vous souhaitez découvrir ce charme particulier des temps oubliés. 

A propos de Baptiste

Être ou ne pas être trve ? Baptiste vous en parlera, des jours et des jours. Jusqu'à ce que vous en mourriez d'ennui. C'est une mort lente... Lente et douloureuse... Mais c'est ce qu'aime Baptiste ! L'effet est fortement réduit face à une population de blackeux.