Interview Prescience
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2 Février 2019
Si le concept de Out of the Grave peut parfois sembler un peu flou, voilà les éclairages des membres de Prescience sur leur récente sortie!
Prescience [Jean-Gauthier - chanteur] Quand j'ai intégré le groupe, j'ai très vite été « mis au parfum » sur la volonté de Gabriel – le guitariste - de faire quelque chose de narratif, un concept album. J'ai intégré le groupe il y à 3 ans et c'était vraiment une première pour moi, je n'avais jamais fait de musique avant. C'est là-dessus que j'ai dû me concentrer d'abord.
Mais les paroles c'est le truc qui m'effrayait le moins, parce que c'est lié à ma formation universitaire et mes intérêts.
Gabriel m'a laissé libre de les écrire comme je l'entendais, en me disant juste qu'il fallait que ce soit narratif donc, et qu'il voulait qu'on aborde la mort. En évitant un maximum de tomber dans les extrémités un peu dark et granguignolesques qui définissent le lien entre le metal et ce sujet.
C'est une question qui m'intéresse et m'angoisse depuis le plus jeune âge, donc c'est venu assez naturellement. Il s'agit de suivre le parcours d'une âme de sa sortie du monde à la fin de toute chose, ou au recommencement.
RMS : Les paroles ne semblent justement pas prendre parti sur la question du Salut. Est-ce par volonté d’objectivité ou par absence de croyance ?
Prescience [Jean-Gauthier]: Effectivement je n'apporte pas de réponse parce que bêtement je n'ai pas expérimenté la mort. Blague à part, je pense que les paroles doivent permettre d'évoquer des choses, d'ouvrir des portes sans les fermer.
Mais plus généralement je suis souvent pris par l'angoisse du néant absolu. Je garde une espèce d'espoir qui n'a rien de religieux, que les atomes et les séquences de l'univers, à force de se détruire en permanence puisse recréer des univers, qu'après des millions de recommencements, il se pourrait qu'on ait vécu plusieurs fois cette vie là. C'est peut-être notre millionième discussion. Mais ce n'est peut-être pas la même conscience qui la produit, ce qui est une autre forme d'angoisse.
Où va l'âme, notre énergie ou ce qui nous anime (peu importe le mot au final), en attendant d'être réintégré dans une forme, s'il y a une réintégration ? Le laps d'inconscience pourrait passer comme un éclair, comme notre nuit au sortir d'un rêve. Et je suis en même temps habité par le fait que cette possibilité logique et mathématique ne soit qu'une façon enfantine de se rassurer, même sans mystique, face à la fin des choses.
C'est un peu de cette tension entre nos tentatives de rationaliser les choses et de panser les plaies de nos angoisses que sont nées les paroles.
En termes d'influences, elles sont variées, et passent aussi bien par Onuphrius de Théophile Gautier, qu'à la mort d'Olivier Bécaille de Zola, qu'à Kafka. En cinéma c'est évidemment 2001 et Enter the Void qui dirigent un peu mes paroles.
Il nous en reste quelques unes à imaginer avant de boucler l'album : je ne sais pas si je parviendrai à répondre à tout ce que je lance, mais l'histoire de cette âme aura une résolution, c'est une certitude.
RMS : Vu que c’est la première fois que j’ai l'occasion de poser des questions a un groupe dont c'est la première sortie : comment avez-vous vécu l'enregistrement et le mixage du CD ?
Prescience [Jean-Gauthier]: Là je ne peux que donner mon avis personnel, Gabriel pourrait mieux te répondre que moi. Mais ce que je peux dire c'est que c'est une expérience particulière. On a l'habitude de jouer ces morceaux en boucle, ce qui tend presque parfois par les rendre un peu irréels.
C'est une expérience en vase clos, un peu douloureuse par moments, quand il faut repenser certains petits détails. C'est un moment où on sent qu'un cycle s'arrête, et c'est encore en enregistrant les chansons, qu'on pourrait s'imaginer qu'elles nous appartiennent, qu'on fasse corps avec. L'enregistrement est un processus tellement étrange, comme une overdose de répét’, où justement plus rien ne t'appartient.
Mais ça restait une expérience fun par les à côtés, les films de merde regardés, les outtakes foireuses etc.
[Gabriel] C'était quelque chose de nouveau pour nous. A part Christophe – à la guitare - et Alex – à la basse - qui avaient déjà une fois eu l'occasion d'enregistrer de la musique nous étions tous novice. De plus, tout l'enregistrement de la démo s'est fait en mode "do it yourself" avec les moyens du bord. La batterie a été enregistrée dans la cave de Julien, le batteur, les guitares et la basse dans l'appartement de Maxime et le chant chez Alex. Nous ne disposions que de 3 micros pour tout enregistrer. C'est vraiment du fait maison, si je puis dire. Pour Maxime, qui s'est occupé de l'enregistrement et du mixage, c'était aussi une première, puisqu'il n'avait jamais enregistré de groupe complet auparavant. Comme il cherchait des artistes pour se faire la main et que l'on cherchait quelqu'un pour réaliser notre démo, l'association s'est faite naturellement.
L'enregistrement a donc été une sorte de grand laboratoire et nous avons pu tester pas mal de choses. Différents réglages d'ampli, différents positionnement des micros par rapport aux amplis etc. Comme tout le monde était novice, tout le monde tentait des choses, proposait des idées. Evidemment il y a eu beaucoup de plantages, mais aussi quelques belles surprises.
A un niveau un plus personnel, en tant qu'instrumentiste c'était assez stressant de pouvoir soudain entendre les moindres nuances de son propre jeu et du même coup toutes les imperfections. Des problèmes insoupçonnés surgissent et on se retrouve à devoir corriger le tir immédiatement. Et puis des fois, en plein milieu d'une prise compliquée un scooter passait dans la rue adjacente et on devait refaire tout le passage...
En tant que compositeur, c'était par contre assez excitant puisque j'ai pu développer les arrangements sur certaines parties et amorcer une réflexion sur le rendu que je voulais donner à l'ensemble. En effet, certains passages avaient été jusque là été arrangés et répétés de façon à pouvoir être joués par 5 personnes en live. Par exemple, sur le passage éthéré de Haunted Cosmos (vers 3:20) on a pas mal travaillé avec Maxime pour essayer de donner de la profondeur à l'ensemble, comme avec les mélodies de guitares qui se chevauchent. Il y a aussi une guitare acoustique mélangée à l'ensemble, même si je ne suis pas sûr qu'on l'entende tant que ça au final, haha
RMS : Suite logique de la parution de l'EP : quel est votre ressenti suite a la sortie de votre CD et qu’est-ce que ça implique pour l’avenir du groupe ?
Prescience [Gabriel]: Déjà c'est un gros soulagement. Ça fait presque 2 ans que tous les morceaux de cette démo sont composés et que nous les répétons toutes les semaines et les jouons en live. C'est très étrange d'investir autant de temps et d'énergie dans un projet pour au final ne pas avoir de résultat palpable. C'est comme si les morceaux n'existaient pas vraiment. Avec la démo on a enfin un produit concret de notre travail.
C'est aussi un soulagement d'entendre que les premiers retours sont positifs. On a beau travailler pendant des centaines d'heures à composer et à répéter, on a toujours au fond du crâne cette angoisse un peu irrationnelle que les autres ne voient pas dans notre travail ce que nous y voyons. Maintenant, on a des personnes à l'autre bout du monde qui nous envoient des messages pour nous féliciter, ça fait vraiment plaisir. Et surtout ça me motive à continuer de composer.
Le prochain objectif est de finir de composer et d'écrire le reste de l'album. Les dernières années, je n'ai pas pu me consacrer à la composition autant que je l'aurais souhaité à cause de mes études (master en Architecture). Maintenant que je suis diplômé je peux dédier beaucoup plus de temps à la composition. Une nouvelle chanson, Unfold The Untold, est déjà finie et nous l'avons jouée à notre release party. D'autres arrivent.
A propos de Baptiste
Être ou ne pas être trve ? Baptiste vous en parlera, des jours et des jours. Jusqu'à ce que vous en mourriez d'ennui. C'est une mort lente... Lente et douloureuse... Mais c'est ce qu'aime Baptiste ! L'effet est fortement réduit face à une population de blackeux.