Sylvaine - Atoms Aligned, Coming Undone
Chroniques
24 Octobre 2018
Nous faire aimer un album avec seulement trois titres disponibles, voilà le défi que s’est lancé Sylvaine et j’aime autant vous dire que c’est chose faite.
La chanteuse et multi-instrumentaliste norvégienne n’a révélé que trois morceaux de son prochain album Atoms Aligned, Coming Undone pour seulement vingt-deux minutes de musique. Mais j’affirme sans aucun doute que nous avons droit à un chef d’œuvre.
Des trois morceaux que nous avons, le plus hâtif de l’album est Mørklagt et à sa seule écoute nous pouvons remarquer ce qui fait toute la force de l’artiste : la musique nous emporte dans un flot d’émotions sans pour autant se perdre en lenteurs ou en méandres grâce à une ligne mélodique constamment relancée sans être répétitive pour autant – que ce soit grâce à la basse ou aux accents bien placés de la batterie. On peut aussi y entendre la voix de Sylvaine, cristalline et mélancolique dans ses passages clairs et plus assurée et puissante dans ses passages black que lors de ses précédents albums. Grâce à un mixage de très haute qualité réalisé par Neb Xort, le tout s’unit pour former une chanson à la structure et aux émotions complexes qui ne sombre pas pour autant dans la cacophonie. Au contraire, l’équilibre est toujours trouvé : les parties mélodiques ne laissent pas de côté les guitares saturées et les moments les plus rudes mettent en avant le chant guttural tout en laissant entendre les chœurs qui l’enveloppent. Le tout se veut kaléidoscope aux mille facettes où chaque mesure, pareille aux miroirs, nous transmet une teinte émotionnelle.
Le morceau suivant est Abeyance et pour celui-ci Sylvaine nous offre un très beau clip à la symbolique forte et au travail esthétique brillant. Le morceau s’ouvre sur un moment de flottement au son étouffé soutenu par Neige d’Alcest aux percussions. Mais loin de l’ataraxie, ce flottement sous-tend plutôt le désir languissant d’un autre monde au sein du tumulte des passions chaotiques qu’exprime le contraste inhérent au projet. Cette bipolarité fonde d’ailleurs l’œuvre dans toutes ses formes, que ce soit par les mélodies aériennes se fracassant contre les rugissements chtoniens ou bien dans l’errance libre malgré les barrières physiques.
Enfin, le troisième morceau dont nous disposons est le dernier acte de cet album: L’Appel du Vide. Le titre nous révèle déjà une mélancolie profonde. Le morceau est l’apothéose de cet album, tout en douceur et atmosphérique, c’est un soleil qui se couche, un linceul au sein d’un écrin. Ses sept minutes sont une invitation au repos éternel et introublé, au nirvana, à la libération – à jamais et pour toujours.
Ce nouvel album de Sylvaine est donc un chef d’œuvre rivalisant avec les plus belles pièces du genre. Malgré seulement trois morceaux sur six, on y sent déjà un travail musical plus mûr et plus apte à exprimer les dilemmes et le chaos internes à l’artiste. L’esthétique y est plus sombre et plus froide que les albums précédents, pour un album plus triste mais plus puissant. Cet album n’a donc rien à envier aux meilleurs d’Alcest car il éveille en nous cette kyrielle de sentiments et, pareil à Virgile, nous entraîne dans les limbes ambiguës des ombres. Rencontre de la lumière et du matériel, recueillez au plus vite cette skiagraphie musicale.
A propos de Baptiste
Être ou ne pas être trve ? Baptiste vous en parlera, des jours et des jours. Jusqu'à ce que vous en mourriez d'ennui. C'est une mort lente... Lente et douloureuse... Mais c'est ce qu'aime Baptiste ! L'effet est fortement réduit face à une population de blackeux.