Contrevents - Contrevents (EP)
Contrevents - Contrevents ou le souvenir vague d’un magnifique concert…
En 2022, dans une cantine du Petit Bain bien remplie s’affairaient deux personnes derrière un amas de claviers, lecteurs K7 ou autres machines et instruments pour construire en continu leur son, trame après trame. C’était le premier concert de Contrevents au Post in Paris et c’était trop bien. Malheureusement, pour les personnes présentes rien n’existait encore : ni démos, ni singles, ni EP… Il fallait donc se contenter de cette expérience sonore comme une aventure unique et vouée à ne rester qu’un vague souvenir d’un concert d’Ambient très captivant … D’autant plus que toute captation live de mon côté n’a pas de son à cause d’une flaque d’eau qui a eu raison de mon téléphone ce jour-là.
C’est donc avec grande joie que j’ai appris cette sortie d’EP par Contrevents, mais aussi avec grande curiosité car je me demandais si mes souvenirs lointains allaient ressembler à la musique que j’allais découvrir !
Contrevents se compose de Maxime Ingrand (Lost in Kiev) et Paul Void (Crève Coeur, ex-Stamp, ex-Al Quasar). Leur EP éponyme se compose de 5 titres électroniques :
- Magnetic Waves
- Dreamer’s Sleep
- Eau-Forte
- Entrer dans la douleur
- Dislocation
Si l’on s’attarde sur les crédits de l’album, on pourra lire :
- Maxime Ingrand : Piano, Synthétiseurs et Guitare.
- Paul Void : Synthétiseurs, Batterie, Bourdonnements et K7.
On peut donc s’attendre, à juste titre, à un album d’Electro Ambient avec quelques samples, tout comme dans mes souvenirs !
Cependant, cette fois, la musique a aussi une image en la photo d’Alexandre Le Mouroux de la danseuse Carline Parois. Une photo dont je trouve le flou réussi qui donne un aspect évanescent au mouvement, ce qui collait parfaitement aux sensations dont je me souvenais de leur musique.
Bref, j’étais donc en parfaite condition pour m’y replonger à nouveau.
En tout cas, le premier morceau Magnetic Waves commençait bien avec les mélodies qui se forment nappes par nappes. C’est d’ailleurs un élément que j’ai toujours adoré dans les musiques progressives, ce côté où l’on vient sans cesse ajouter de nouveaux éléments à la trame principale, que ce soit des variations de thème ou même de nouveaux éléments sonores. Et l’on peut dire que ce premier morceau m’y a fait de suite penser et c’est certainement lui qui se rapproche le plus de mes lointains souvenirs de leur concert parisien.
Comme l’on pouvait s’y attendre, Magnetic Waves nous balade dans un univers Ambient qui recèle de plein de petites nappes cachées parmi d’autres.
Dreamer’s Sleep est assurément le morceau qui m’a le plus surpris avec ce clavier basé sur un sample de voix. Rien d’étrange là-dedans, mais c’est vrai que ce n’est pas forcément quelque chose que l’on pouvait attendre pour une musique parlant du sommeil d’un rêveur. Il faut dire aussi que la musique est loin d’être paisible entre sa batterie ou ses bourdonnements qui la rendraient presque digne d’une B.O. d’un drame futuriste. Car finalement, ce sommeil était loin d’être tranquille.
Eau-Forte avec son côté mi Post-Rock mi Indus nous fait continuer notre exploration dans cette musique planante et lancinante. Pourtant les percussions organiques donnent un véritable dynamisme au morceau avant d’être accompagnées par des percussions plus électroniques. Eau-Forte se voudra comme son prédécesseur, c’est-à-dire un morceau évolutif qui n’aura de cesse d’apporter de nouvelles péripéties à notre voyage. D’autant plus que le dernier tiers de la musique tranche radicalement avec ses expérimentations sonores et ses bourdonnements.
Entrer dans la douleur m’a de suite fait penser à une musique Post-Rock telle que l’on pourrait en entendre dans Bruit ≥. Toutefois, Entrer dans la douleur est un morceau d’Ambient servant de faire-valoir à des discours traitant de l'écologie ou sur le vivre ensemble. Des discours ou des discussions mélangées pour former un tout cohérent, mais dont je n’ai pu reconnaître que la voix d’Alexandre Astier ; les autres m’étant inconnues.
On pourra aussi adorer le travail des synthés qui m’ont vaguement rappelé le travail de Michał Łapaj (Riverside) sur ses Jam Sessions, mais qui passe malheureusement un brin trop vite. La construction de la fin du morceau étant pour le coup très intéressante !
Mais l’idée derrière la création du morceau vaut aussi le coup, voici ce qu’en dit Maxime dans le dossier presse :
“Le sort de notre planète me touche et m’inspire. Y penser me met dans des états émotionnels particuliers. Notre propre pratique de la musique électronique relève d’un paradoxe. Nos machines sont construites à l’autre bout du monde, et gaspillent de l’énergie, mais on les utilise pour soutenir un morceau comme "Entrer Dans La Douleur". C’est cathartique. C’est presque une excuse mentale : je me fais plaisir à créer de la musique, tout en me posant des questions sur la viabilité de tout ça. En ajoutant les mots de ceux qui en parlent le mieux par-dessus, ça a encore plus de sens.”
Dislocation, initialement composée pour Arche si l’on en croit le dossier presse (le projet solo de Maxime de ce que j’ai pu trouver) sort finalement sous les couleurs de Contrevents. Ce morceau se forme autour d’un piano qui se verra progressivement accompagner de synthés, claviers et autres ambiances sonores. On voguera vers un morceau de plus en plus complexe avec de plus en plus de nappes sonores, mais qui resteront toujours clairement identifiables. Une conclusion très bien choisie puisque le morceau fait véritablement honneur à tout ce que l’on a pu entendre précédemment tout en illustrant la puissance qu’a la musique de Contrevents.
Contrevents nous délivre ici un voyage que j’ai adoré vivre et revivre. On est balloté aux grés des différentes nappes de synthés dans une aventure passionnante. Bien que peu de musiques ou de mélodies m’ont rappelé le concert au Petit Bain, j’ai été ravi d’entendre que l’EP était aussi magnifique que l’étaient mes souvenirs. Comme quoi l’attente en valait la chandelle.
Pour les personnes intéressées, de magnifiques K7 en édition limitée sont disponibles sur le bandcamp du label Sleepless Owl Records. Si vous êtes de nature patiente, n’oubliez pas que chaque premier vendredi du mois, bandcamp ne prend aucune commission sur les ventes des artistes.
A propos de Gauvain
Jadis chroniqueur acharné, Gauvain préfère dorénavant occuper son temps libre à l'animation de lives hebdomadaires sur notre chaîne Twitch à la découverte de groupes intéressants. La légende raconte qu'on y passerait jamais de Metal... Il n'est cependant pas rare de le voir publier quelques articles à l'année quand l'envie lui prend.