Bloodshot Dawn - Reanimation

Bloodshot Dawn - Reanimation

Chroniques 21 Avril 2018
   Les Anglais de Bloodshot Dawn commencent à se faire une sacrée réputation dans la scène Melodeath Européenne ! Formé en 2003 par le frontman Josh McMorran en 2003, le groupe a sorti son premier album éponyme en 2012, suivi de Demons en 2014, et enfin, Reanimation, le 12 Janvier 2018, dont on va causer aujourd’hui. 

   Je n’avais pas spécialement d’attente par rapport à cet album. J’ai découvert le groupe, comme beaucoup de monde, avec l’album Demons, qui a fait beaucoup de bruit chez les fans de Melodeath en raison de sa production très moderne à base de milliards de nappes de synthés, et de leads omniprésentes, amenant à un son très lisse, presque « pop » (attention, je parle bien du son hein…), ce dont je ne suis pas particulièrement friand. Et donc, qu’est-ce que ça donne ce nouvel album ?  

   Et bien globalement, j’ai trouvé cet album très efficace. Bloodshot Dawn nous propose là un album très sombre dans ses différentes ambiances, avec des riffs ultra lourds, un growl abyssal, des enchaînements d’accords dissonants, mais en même temps éblouissant, de par ses mélodies épiques, futuristes et accrocheuses, sa technique absolument monstrueuse (les premières secondes de l’album devraient en convaincre pas mal, avec le morceau Seared Earth…), et sa production très lumineuse, presque « pop » comme je l’ai dit précédemment. Celle-ci se rapproche beaucoup de la vague de groupes de Melodeath Suédois, lancée notamment par Scar Symmetry, ce qui n’est pas un hasard, puisque Per Nilsson, guitariste Lead de Scar Symmetry, s’est occupé du mixage et du mastering de cet album de Bloodshot Dawn

   Le principal atout de cet album selon moi : la gestion des mélodies. Déjà que les mélodies et les leads des guitaristes Josh McMorran et Morgan Reid sont d’une efficacité redoutable, ce sont surtout les différentes manières par lesquelles elles sont amenées qui les rendent intéressantes. C’est particulièrement flagrant sur le morceau Reanimated, dont le thème mélodique est ultra marquant, car en plus d’être terriblement accrocheur, il n’est pas utilisé de façon abusive comme chez une grande partie des groupes de Melodeath peu inspirés (un pléonasme vous dîtes… ?). Non, ici , Bloodshot Dawn a l’intelligence de placer ce thème juste après un riff très lourd, qui tend à perdre l’auditeur dans une masse de notes ultra rapides. On en revient à la dualité que j’ai évoqué plus tôt : le fait d’amener ce thème mélodique juste après un enchaînement de riffs posant une ambiance très déconstruite et obscure ne peut que le rendre plus marquant. On a vraiment l’impression de couler au fond des abysses les plus sombres puis d’être propulsé soudainement dans les cieux. C’est un album très bipolaire, dans le bon sens du terme, s’il y en a un.  

   Cependant cela ne suffit à rendre cet album vraiment intéressant. Il y a vraiment trop de riffs, voire de morceaux, en trop. L’album fait 45 minutes mais ne raconte pas grand-chose selon moi, si ce n’est cette ambivalence entre la mélodie éclatante et la lourdeur abyssale. Ceci, étalé sur 45 minutes ça en devient lassant. Si encore il y avait eu d’autres idées exploitées, comme des structures plus complexes, des arrangements mélodico-rythmiques entre les deux guitares, ou des riffs plus recherchés harmoniquement parlant, cet album aurait pu être une perle. Mais le groupe se place trop de barrières en termes de composition. Bloodshot Dawn manque cruellement d’audace dans la forme de ses riffs. C’est assez flagrant sur des morceaux comme Shackled ou Upon the Throne of Fear, qui doivent être, certes, terriblement efficaces en live, mais qui sont pour moi assez insipides sur album. On tourne beaucoup trop autour des breakdowns bancals et du bourrinage de corde grave. Certes, c’est ce genre de riff qui donne sa part « sombre » à l’album, mais il y a beaucoup d’autres moyens plus intéressants de transmettre cet aspect en musique, ne serait-ce que par les nappes de synthés. Le groupe en utilise beaucoup, mais la plupart du temps elles ne servent qu’à doubler la rythmique, ou à remplir l’espace sonore pendant les leads. 

   Bref, il y a beaucoup d’excellentes idées sur ce Reanimation. Mais elles sont selon moi trop peu, ou mal exploitées. C’est un album qui en fait des tonnes, pour au final ne pas raconter grand-chose d’intéressant, ce qui est très frustrant. Dans un sens, j’ai envie de dire qu’il y a un énorme potentiel dans ce groupe, et que s’il parvient à diversifier ses moyens de composition, il deviendra vraiment unique et remarquable. Mais l’inverse pourrait tout aussi bien arriver, c’est-à-dire tomber dans le Melodeath bas du front, encore plus simple, plus lisse, et moins ambitieux. Dans tous les cas cet album est loin d’être vide, et mélange avec brio les mélodies percutantes et épiques avec la noirceur d’un Death Metal hyper nerveux. Bloodshot Dawn fait des promesses, et les tient. Mais ça serait bien d’avoir des promesses plus ambitieuses et plus diverses ! 

 13/20